Principes généraux
S’il est admis que le temps de trajet domicile-lieu de travail n’est pas du temps de travail effectif, sauf exceptions bien particulières, tel n’est pas le cas du temps de trajet entre deux lieux de travail.
En effet, il de jurisprudence constate qu’un temps de trajet établi entre un lieu de travail à un autre lieu de travail constitue un temps de travail effectif ; le salarié se trouvant à la disposition de son employeur et ne pouvant se soustraire à son autorité pendant le trajet :
« Vu l’article L. 3121-1 du code du travail ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X…et deux autres salariés ont été engagés en qualité de maçon par la société Estèves constructions, (..) qu’ils ont saisi la juridiction prud’homale d’une demande en paiement d’un rappel de salaire au titre du temps de trajet pour se rendre du siège de l’entreprise aux lieux d’exécution des chantiers ;
Attendu que pour les débouter de cette demande, l’arrêt retient que pour la mise en place des » 35 heures « , l’employeur a eu recours à un consultant extérieur, lequel atteste avoir donné lecture et expliqué aux salariés les modalités de réduction du temps de travail et l’exclusion des temps de trajet du temps de travail effectif, qu’ainsi le transport dans un véhicule mis à disposition par l’entreprise des salariés, qui par ailleurs percevaient l’indemnité conventionnelle de trajet, ne permet pas de considérer les temps de trajet entre le siège de la société et les chantiers comme des temps de travail effectif ;
Qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher comme il lui était demandé, si les salariés avaient l’obligation de se rendre pour l’embauche au siège de l’entreprise et s’ils étaient dès lors à la disposition de l’employeur et ne pouvaient vaquer à des occupations personnelles, ce dont il résultait que le temps de trajet entre l’entreprise et le chantier constituait un temps de travail effectif et devait être rémunéré comme tel, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ; »
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE »(Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 31 janvier 2012, 10-28.573, Inédit )
Conséquences – risque d’une qualification de travail dissimulé
La Cour de Cassation, dans sa chambre criminelle, a d’ailleurs récemment rappelé ce principe et en a tiré toute les conséquences juridiques au regard du travail dissimulé :
« Attendu que, pour infirmer le jugement entrepris et déclarer les prévenus coupables de travail dissimulé, l’arrêt énonce que le temps de déplacement professionnel entre le domicile d’un client et celui d’un autre client, au cours d’une même journée, constitue un temps de travail effectif et non un temps de pause, dès lors que les salariés ne sont pas soustraits, au cours de ces trajets, à l’autorité du chef d’entreprise ; que les juges ajoutent que l’intention coupable des prévenus se déduit de leur refus persistant de se soumettre à la législation en vigueur malgré deux rappels de l’administration compétente ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, et dès lors que ne sont pas applicables à la présente espèce les dispositions de l’article L. 3121-4 du code du travail, la cour d’appel a justifié sa décision »
(Cour de Cassation, Chambre Sociale, 2 septembre 2014 n° 13-80.665 )